Envel croisa le regard d'Aïla.
Bon sang, pourquoi devait-elle être aussi attentive ?
Le garçon se redressa, légèrement mal à l'aise.

- "Je... Oui. mais ça ne doit pas être grave."

Pas grave ? La douleur qui lui traversa le dos fut alors telle qu'il dut se cramponner à la table pour ne pas crier. Il haleta, repoussa les mèches cuivrés qui lui étaient tombées devant les yeux, s'apprêta à se soumettre au regard franc de la jeune fille...
N'en eut pas le temps.
Un cri déchira l'air.
Non. Pas un cri.
Un hurlement. Un rugissement. Un son terrible, assourdissant.
Un appel désespéré.
Dans l'auberge, tout le monde se figea. Plusieurs personnes firent des signes de croix. Une petite fille se réfugia en pleurant dans les bras de sa mère.
Envel, lui, avait pâli.
Son visage par ailleurs si impassible était devenu bouleversé, bouleversant.
Lentement, il leva les yeux vers Aïla.
Elle avait compris. Elle aussi.
Le moment était venu.
Envel se leva.
Posa ses yeux violets sur la jeune fille.

- "Aïla... Viens avec moi."

Pas une demande.
Un appel à l'aide.
Il ne le comprenait pas.
Mais il avait besoin d'elle.

Envel sortit, Aïla à sa suite. Dans la rue, les gens restaient immobiles, l'oreille aux aguets, guettant avec angoisse un autre cri. Le garçon s'efforça de réfléchir calmement. Mais son esprit était en ébullition. Son impassibilité légendaire s'était effondrée, en un instant.
L'auberge. Aïla ne voudrait sûrement pas partir sans Neyle. Et puis, il fallait prévenir Mary.
Envel s'y dirigea. Il entra d'un pas rapide dans l'auberge, Mary se précipita vers lui.

- "Jésus Marie Joseph, vous avez entendu ? On aurait dit un... Mais... vous partez ?"

Envel leva les yeux vers elle. Il lui fit un rapide signe de tête, balbutia un semblant d'explication ressemblant à "une urgence...", puis passa son sac en bandoulière sur son épaule. Il sortit sa bourse, en donna la moitié du contenu à la femme.

- "Merci, Mary. Merci pour l'accueil. Mais nous devons... Je dois..."

Envel ressortit sans achever sa phrase. La femme secoua la tête, perplexe.

- "Bon Dieu, ce garçon aurait-il perdu la tête ?"

Le jeune homme attendit Aïla, fébrile. Dès qu'elle fut prête, il l'entraîna dans les rues de Firewall, droit vers les grandes portes où les gardes, encore abasourdis, les laissèrent passer sans problème. Les deux jeunes gens se retrouvèrent hors des murailles de la cité, face au ciel qui achevait de s'embraser sous la lumière du couchant. Là, Envel s'arrêta.
Essoufflé, il attendit. Ses yeux parcouraient l'horizon fébrilement, à la recherche d'un indice qui ne venait pas.
Puis, le cri retentit de nouveau. Un frisson, comme une décharge électrique, parcourut le dos d'Envel.
Lentement, il se tourna vers une direction qui semblait hasardeuse. Sa respiration, doucement, ralentit.
Il se mit en marche. Etrangement apaisé.
Il allait vers le dragon. Son dragon.
Ethnar.

HJ : tu réponds, puis je crée un nouveau sujet ?

HJ/ ok ^^


Aïla suivit Envel sans ajouter un mot. C'était à peine si elle le reconnaissait. Arrivés à l'auberge, Mary se précipita vers eux, dans tous ses états. Le regard troublé d'Aïla se posa sur la femme si chaleureuse. Alors, enfin, son cerveau sembla se remettre en marche. Elle masqua ses inquiétudes pour lui sourire :

"Il n'est certes pas fou ! Nous sommes vraiment désolés de devoir partir si soudainement... Merci pour tout Mary."

Envel avait déjà disparut. Aïla posa un baiser sur le visage ébahi de Mary et se précipita également dans sa propre chambre. En quelques secondes, le peu d'affaires qu'elle possédait furent rassemblées. La jeune femma souleva sa saccoche et redescendit rejoindre son ami impatient.
Impatient de partir.
Aussitôt qu'il la vit, il l'entraina au dehors. Aïla eut juste le temps de faire un sourire aux deux gérants de la petite auberge :

"Je repasserai par Firewall !"

Neyle l'attendait. Elle hennit en voyant sa cavalière. Aïla carressa son amie pour la rassurer. Hey ! Avec l'inquiétude qui reignait en ville suite à l'étrange et effrayant rugissement, le comportement inhabituel d'Envel et l'air troublé de sa jeune maitresse, il n'en fallait pas plus pour l'inquiéter !
Que pouvait-il bien se passer ?
Enfin, dans tous les cas, ils sortaient enfin de la ville ! Et ces grandes plaines, synonymes de liberté... Aïla avait peine à convaincre Neyle de ne pas partir au galop ! Eh, bon dieu ! Allaient-il rester cent-sept ans au milieu de cette plaine vide ?! Rah ! Et Aïla qui restait ainsi à côté d'elle, le regard dans le vague !

Soudain un second rugissement retentit. Neyle baissa les oreilles, fit quelques pas en arrière.
Et comme Envel allait à la rencontre du dragon, Aïla hésita. Douta.
Mais il lui vait demandé de venir, non ?
A bout de patience, Neyle poussa Aïla pour suivre le jeune homme.
Alors Aïla suivit.