Le petit groupe se dirigeait tranquillement vers la ville. Chose surprenante Isa marchait à leur côté, et non loin devant, comme à son habitude.
Ingwë était tout guilleret. Isas devenait, un tout petit peu, plus sociable. En tout cas il était en progrès !
Ils arrivèrent donc aux portes de la ville. Au moment d’y passé les soldats la gardant eurent l’air surprit en voyant Isas passer avec ses vêtements déchiqueter :

-Madame. Saluèrent-ils Soya en parfait gentlemen.

Par contre ils voulurent stopper l’elfe. Permettre à un gueux de rentrer ne les enchantait guère. Un seul regard de ce dernier les décida à le laisser passer…
Ce qu'il fit sans encombre.

Soya et Isas franchirent les portes de la ville sans encombre. Les gardes saluèrent poliment la jeune femme, ce qui la fit sourire. Elle qui était du clan de l'Air, ils la saluaient, et Isas, clan de la Terre, ils l'ignoraient ! C'était le monde à l'envers...
Ou fallait-il rappeller à Soya que les gardes étaient des hommes ?
La fée parcourut la cité du regard. Ses yeux d'ambre se posaient sur les personnes présentes avec anxiété.
Ils l'observaient. Et pas amicalement.
Soya serra les poings. Elle n'avait jamais été très à l'aise en présence de quelqu'un du clan de la Terre. Surtout un homme.
Sauf avec Isas. Mais avec lui, c'était différent. Il ne réagissait pas comme les autres.
Enfin. Tout ça pour dire que dans cette cité du clan ennemi, elle n'était pas des plus détendues.
La jeune femme posa son regard ambré sur le soleil qui achevait de ne devenir qu'une ligne à l'horizon.

- "Bon, eh bien je suppose que c'est un peu tard pour faire les magasins. Il faudrait plutôt se trouver une auberge."

Isas pencha la tête vers ses vêtements. Il haussa les épaules et attrapa un petit lambeau de tissus qui pendouillait sur sa jambe. Il le tira et l’arracha :

-Je doute effectivement qu’à cette heure là on trouve quoique se soit d’ouvert.

Ils marchèrent d’un pas tranquille. Et presque provocateur, l’elfe posa son petit bout de tissus dans les mains d’un passants qui le regarda éberlué mais n’osa pas riposter. Isas s'en alla sans se retourner.

Soya eut un petit rire en voyant le geste légèrement provocateur d'Isas. Mais elle ne dit rien et le suivit, Isïl sur ses talons.
Tout en cherchant une auberge dans les dédales de la ville, la jeune femme ne put s'empêcher d'être mal à l'aise. Partout où ils allaient, des chuchotements s'élevaient. Soya savait qu'Isas n'était pas vraiment en bons termes avec son clan, mais elle se doutait aussi que sa présence n'y était pas pour rien.
Et comment...
Un homme. Dans la foule.
Un homme qui sortit un poignard de sa veste.
Darda un regard mauvais sur Soya.
Les suivit. Attendit que la foule soit moins dense.
Puis, brusquement, bondit.
Droit sur la jeune femme.

- "Traîtresse ! Hada Roja, réincarnation démoniaque ! Traîtresse !"

Soya se tourna. Esquissa un mouvement de défense...
Se figea.
Le poignard. Le poignard qui fonçait droit sur elle, prêt à la blesser.
A la tuer...
La jeune femme fut parcourut d'un tremblement.
Réminiscence. Pas des plus agréables.
"Traîtresse..."
Soya ne bougeait plus. Les yeux fixés sur le poignard, revivant un souvenir dont elle se serait bien passée.
L'homme cria...

Les chuchotements qui s’élevaient ne gênaient gèrent Isas. Il n’était pas elfe à se soucier de ce que l’on pouvait penser de lui. Aussi n’y prêtait-il aucune attention. Toutefois Soya semblait mal à son aise dans cette ambiance. Il haussa les épaules. Ce n’était pas son problème si cette fille avait tant besoin du regard des autres.
Tout à coup il releva son regard. Un homme avait tiré son poignard et s’élançait vers la jeune femme :

- Traîtresse ! Hada Roja, réincarnation démoniaque ! Traîtresse. Hurla-t-il.

Isas leva un sourcil. Il mit un certain temps à se souvenir de ce que lui avait raconté Soya la dernière fois.
Personnellement il trouva cet homme stupide.
Il était évident que cette fille n’était pas habitée par un démon. Par contre lui…il n’en avait pas besoin. Puisque on pouvait presque dire qu’il en était un !
Il eut un sourire mauvais. Il avait désiré un défouloir. Il en avait trouvé un ! Tel une ombre il se glissa entre les deux personnes. De toute façon la fée n’avait pas l’air très réactive…

L’agresseur fut stoppé dans son élan par un coup de poing magistralement envoyé en plein visage. Un craquement sec retentit. Le type n’avait plus le nez en bon état.
Il vola sur quelques mètres renversant au passage nombre de tonneaux se trouvant sur sa trajectoire. Des cris des passants affolés retentir.
Isas n’y prêta aucune attention. Son regard fixait l’homme. L’ordure, devant lui. Il avait voulu tuer la femme qui avait sauvé Ingwë. La femme qui avait sauvé son seul compagnon. La femme à qui il devait bien plus que la vie. Cette pourriture allait le regretter !
Isas s’approcha doucement. L’homme se leva péniblement. Il fixa hargneusement son détracteur. Ses yeux changèrent une fraction de seconde. La rage et la haine faisant place à la terreur :

-Messire Eressëa. Quelle surprise !

L’elfe ne frémit même pas. Une petite troupe de badaud curieux commençait déjà à s’ameuter. Voyant sa situation s’aggraver l’adversaire tenta de se défendre :

-Mes raisons étaient justes. Cette femme est l’incarnation du démon !

Se fut trop pour l’elfe.
De sa main gauche il attira l’homme à lui, de la main droite il le frappa. Le coup fut tellement fort que ses vêtements se déchirèrent et qu’il tomba de nouveau au sol:

-Avant de porter un jugement vérifie donc tes dires.

Il lui balança un violent coup de pied dans l’estomac qui le fit se soulever jusqu’à sa hauteur:

-Je dois bien plus à cette femme que tu ne le comprendras jamais !

Sa main s’abaissa avec force, de façon irréelle. De nouveau il y eu un craquement. La tête se brisa une première fois sous le choc du poing de l’elfe, et une deuxième quand elle atterrit violement au sol.
Il était mort.
Personne ne pourrait plus jamais le reconnaître. Son visage était éclaté devant comme derrière. L’elfe regarda impassiblement le spectacle sanglant qu’il venait de réaliser. Au bout d’un moment il releva la tête. Fixant furieusement la foule emmurée dans un silence terrorisé :

-Le premier. Siffla-t-il. Le premier qui osera poser, ne serait-ce qu’un doigt sur cette femme.

Il la désigna sans pour autant se retourner vers elle :

- Je lui fais connaître un sort encore plus horrible que ce truc. Dit-il en balançant un coup de pied dans le ventre du mort.

Celui-ci se retourna alors sur le dos, dévoilant une vision d’horreur. Comment faire connaître pire ? Bonne question. Mais avec Isas…mieux vaut ne pas demander… Certaines personnes retinrent à grand peine un cri terrifié. La peur leur dictant de ne pas se faire remarquer. Surtout quand on voyait ses yeux. De le haine. De la haine à l'état pure. Cet elfe était véritablement un démon... :

-Allez viens. Ordonna-t-il à Soya.

Elle semblait encore sous le choc. De quoi ? De l’attaque inopinée ou de l’acte de l’elfe ? Dans tout les cas il ne désirait pas se faire admirer plus longtemps. Il la saisit par l’épaule et l’entraina vivement à sa suite.
Immédiatement la foule se découpa en un passage très large et net pour les laisser passer.

# Tu vas encore nous attirer des ennuis# Soupira Ingwë.

Soya ne réagissait toujours pas. Quand l'elfe s'interposa, quand il réduisit l'homme à l'état de charpie à la seule force de ses poings, la jeune femme ne frémit même pas. Les remarques d'Isas sur son compte auraient dû lui tirer un sourire...
Auraient dû.
Ce fut Isïl, en lui soufflant doucement dans le cou, qui la ramena à la réalité.

# Soya... Ce n'était pas lui. #

La jeune femme secoua la tête et soupira.

# Je sais. #

Isas l'entraîna alors plus loin. Soya eut tout de même le temps d'apercevoir le corps méconnaissable de l'homme qui l'avait attaqué.

- "Tu n'étais pas obligé... De t'acharner autant sur lui, je veux dire. J'ai l'habitude des scènes comme celle-ci..."

Elle s'attendait déjà à la question qui allait suivre. "Dans ce cas, pourquoi ne t'es-tu pas défendue ?". Elle la devança donc.

- "Mais cette fois-ci j'ai eu... Une absence. Navrée de n'avoir pas réagi."

Elle savait qu'avec Isas se justifier ne servait à rien, mais le fait est qu'il savait à présent qu'elle aurait pu se débrouiller, et de loin.
Enfin. De toute manière, il avait sans doute déjà oublié sa réaction plutôt étrange...

- "Bon. On la trouve, cette auberge ?"

Isas haussa les épaules et lâcha celle de Soya :

-J’ai une dette envers toi. Alors que tu réagisses ou pas je suis désormais ton débiteur.

Ingwë eut un instant de flottement. Isas ? Débiteur ? Wouha ! Tant que ça!
Il sourit intérieurement. Tout content.
Quand à l’auberge… Ce n’était pas dans les habitudes de l’elfe de s’enfermer dans une maison :

-Prends celle qui te conviens, du moment qu’elle est suffisamment éloigner de cet endroit.

Il valait mieux, en effet, éviter de rester dans les parages après ce que venait de faire Isas.

Soya sourit. Son débiteur ?

- "Me voilà bien avancée, avec un débiteur pareil," soupira-t-elle, l'air faussement ennuyé.

Isïl hennit, heureuse de voir que son amie retrouvait sa répartie.
La jeune femme circula dans les dédales de la grande ville, à la recherche d'une auberge convenable. Elle finit par en trouver une avenante, pourvue d'une grande écurie et loin du tulmute de la cité. Isas à sa suite, elle entra.
Soya s'accouda au comptoir et sortit sa bourse. Le gérant s'avança et la salua.

- "Deux chambres et deux places dans l'écurie pour un griffon et une licorne, s'il vous plaît."

Le gérant jeta un coup d'oeil à Isas.

- "Vos montures sont-elles agressives ?"

Soya sourit.

- "Pas si on ne les provoque pas."

L'aubergiste se détendit. Il rafla les pièces que lui tendaient la jeune femme et se tourna vers le tableau où étaient accrochées les clés des chambres.

- "Voilà. Chambres 7 et 9, toutes deux avec salle d'eau. Passez une bonne soirée."

Soya se saisit des clés.

- "Merci."

Elle en lança une à Isas, qui l'attrapa au vol. Puis elle ressortit de l'auberge et amena Isïl à l'écurie.
les palefreniers se précipitèrent aussitôt vers elle et lui proposèrent avec de galants sourires de prendre en charge la pyrocorne. Soya déclina l'offre en souriant.

- "Je vous remercie, ce ne sera pas nécessaire."

Isïl entra dans un box spacieux et confortable. L'auge était remplie de foin, et l'abreuvoir d'eau fraîche. La jument poussa un ronflement satisfait, puis commença à boire.
Soya saisit différentes brosses et commença à panser soigneusement Isïl, en chantonnant doucement ou en conversant avec son amie.

Soya se décida donc. Bon ou mauvais choix…peu importe. Toujours est-il que l’état des vêtements d’Isas ne parut gère enchanter le gérant. Cependant il ne dit rien et accéda à leurs attentes.
Une fois emmener dans l’écurie personne, enfin si, quelqu’un essaya vaguement de s’approcher de l’elfe dans le but de s’occuper du griffon. Il eut tôt fait de partir en courant sous le regard peu amène de son "maître".
Ingwë s’exaspéra :

# Sérieux Isas… Tu devrais vraiment devenir aimable.#

Puis après réflexion :

# Quoique je crois que ça me ferait peur. J’ai tellement peu l’habitude.#

Il éclata de rire intérieurement quant Isas se contenta d’un demi-sourire. Le griffon triompha :

# Regarde Soya ! Il est canon Isas quand il sourit !#

Ce dernier sursauta et étouffa à grand peine une bouffée de colère. Comment osait-il ?! Ingwë le nargua et reprit :

# Tu ne trouves pas ?#

Cette fois-ci il eut vraiment l’impression, malgré le fait qu’il soit sous sa taille originel, qu’il allait subitement traverser l’écurie de part en part.

Soya fut quelque peu... surprise de la question d'Ingwë. Elle se tourna machinalement vers Isas, tandis qu'Isïl partait d'un grand hennissement, un éclat de rire, en fait.
Devant l'air furieux de l'elfe, la jeune femme ne put réprimer un sourire. Après tout, lui la provoquait continuellement sur son prénom, alors pourquoi pas...

- "Si," répondit-elle d'un air impassible en se tournant de nouveau vers Isïl, qui n'en pouvait plus.

Soya aussi rit de bon coeur. Après un sourire moqueur et un tantinet provocateur à l'elfe, elle souhaita bonne nuit à Isïl et Ingwë, sortit de l'écurie et se dirigea vers sa chambre, sous les regards aguicheurs de la clientèle masculine de l'auberge.

-Si.

Isas s’étrangla pour de bon. Mais elle se fichait de lui en plus ! Raah ! Pourquoi avait-il l’impression que par moment le monde se liguait contre lui ?
Soya fini alors par partir. De son côté l’elfe resta encore quelque secondes à lisser les plumes du griffon. Furieux.
Ingwë le sentit bien :

# Rooh ! Allez c’était de l’humour.# Fit-il

Isas soupira. Et au lieu de poser son chiffon qui lui servait à lustrer la fourrure de son ami là où se trouvait les brosses, il lui jeta à la figure pour tourner les talons et s’éloigner de l’écurie :

# Mon Dieu tu es d’un susceptible Isas…#

Le griffon rit, le dos tourné, Isas avait un demi-sourire. L’un comme l’autre savait que cette histoire était déjà oubliée, peut être même avant qu’elle est commencée.
L’elfe rentra alors dans l’auberge. Il regarda le numéro de sa clé.
Numéro 9…
Il referma la main, monta à l’étage et ouvrit la chambre qu’il lui était désigné. Sitôt rentré il enleva directement ses vêtements pendouillant de partout et se glissa sous la douche.
Elle fut plutôt courte. Mais se fut lui qui le choisit et donc ne s’en plaignit absolument pas. Il n’était pas genre à se pomponner des heures.
Une serviette noué autour la taille en guise de pagne il jeta un bref coup d’œil sur ce qui lui servait habituellement pour se couvrir.
Inutilisable.
Il pesta. Il aurait dû exiger des vêtements avant de monter. Il aurait dû… Mais voila il ne l’avait pas fait.
Il se laissa alors choir comme une masse sur le dos dans le lit moelleux. Bras croisé derrière la tête il fixa le plafond.

Soya était montée dans la chambre 7, et resta un instant appuyée pensivement contre le mur, à regarder par la fenêtre.
Elle eut un mince sourire, mi-figue mi-raisin. Certes, elle avait répondu à la question d'Ingwë pour provoquer l'elfe...
Mais d'un autre côté, elle n'avait pas vraiment menti.
La jeune femme soupira et se passa la main dans les cheveux. Si ça ne tenait qu'à elle, elle se serait mise une gifle.
Pas ça. Elle n'avait plus le droit.
Plus l'envie, surtout. Peur des conséquences.
Elle avait assez subi.
Elle secoua la tête pour chasser ses pensées, et entra dans la salle d'eau. Un large vasque était creusée dans le sol, remplie d'eau fumante. La fée se glissa dans celle-ci avec délice.
Elle se lava soigneusement, resta un moment à profiter des bienfaits d'un bain, puis sortit de l'eau. Elle choisit une serviette assez longue pour la couvrir jusqu'à mi-cuisse, qu'elle noua autour de sa poitrine. Puis, ses longs cheveux gouttant dans son dos, elle rentra dans la chambre.
Soya s'approcha du lit, s'agenouilla, une main retenant sa serviette contre elle, et fouilla dans son sac à la recherche d'une tenue propre. Elle pencha la tête, ses cheveux auburn s'étalant sur son épaule droite.

# Je n'ai jamais été très ordonnée, mais là... Il faudrait vraiment que je fasse le tri. #

Isas se releva alors d’un coup. Il n’allait tout de même pas rester enveloppé dans une serviette de bain pendant 300 ans.
Vérifiant une dernière fois qu’elle était solidement attachée à sa taille il sortit. Ses cheveux d'encre encore à demi mouillés s'agitaient en fonction de ses mouvements.
Il pouvait toujours mettre un tantinet sa fierté de côté, et lui demander un peu d’aide.
Cette idée ne l’enchantais gère mais bon. Il n’avait pas spécialement envie de remettre ses affaires déchiquetées.

Avec sa délicatesse habituelle il ouvrit la porte à la volé, ne se souciant même pas de sa tenu si peu décente :

- Au fait Soyalo…

Il s’arrêta sur le pas de la porte.
Figé.
Ses yeux se posèrent sur la jeune femme.
Il eut l’air désemparé.
La porte se referma encore plus vite qu’elle ne s’était ouverte.
Isas s’adossa à l’embrasure :

-Euh… Fit-il sans vraiment savoir quoi dire. Quand tu seras... plus habillée, tu pourrais aller me chercher des vêtements? Les miens sont trop abimés pour pouvoir être remis.

Il fallait l'avouer. Quand un elfe débarquait torse nu, sans frapper, dans votre chambre alors que vous n'étiez guère plus habillée que lui...
Ça surprend.
Aussi Soya resta un instant interloquée et même vaguement choquée.
Et puis, croisant le regard désemparé d'Isas, le voyant refermer la porte à toute volée, et entendant sa voix quelque peu perturbée de l'autre côté du battant...
La jeune femme ne résista pas.
Elle éclata de rire.
Un rire clair et carillonnant, un rire spontané qu'elle ne pouvait pas retenir.
Toujours en riant, Soya s'habilla rapidement. Puis elle sortit de sa chambre.
Elle se planta devant Isas, un sourire légèrement moqueur sur les lèvres. Ses yeux ambrés brillaient à la lumière des lanternes suspendues au plafond, lumière qui accrochait de beaux reflets chatoyants dans ses cheveux encore humides.

- "Je suppose que c'est dans mes capacités. Je demande au gérant, ou préfères-tu que je parcours la ville à la recherche d'une boutique ouverte à cette heure tardive ? Et quels vêtements ? Couleurs, matières, as-tu une préférence ?"

Elle se fichait de lui, ça se voyait. Un fin sourire sur le visage, les bras croisés, Soya attendait les réponses de l'elfe, qu'elle avait pour une fois prit au dépourvu, apparemment...

Isas ne put s’empêcher de lever un sourcil en entendant le rire clair de la fée. Qu’est-ce qu’il y avait de drôle ?
Enfin elle était vachement peu habillée tout de même. Y avait de quoi être désemparé !
Il soupira vaguement vexé en attendant la suite.
Durant la, courte, attente de l’arrivé de Soya, un couple monta les marches. Se fut le regard un peu plus qu’appréciateur que lui lança la femme qui lui fit se rendre compte que lui aussi était bien peu habillé… L’homme se contenta de poser sur lui des yeux surprit et interrogateur.
Puis se furent une lueur moqueuse qui s'alluma dans leurs yeux.
Que faisait un homme encore à moitié mouillé, enroulé dans une courte serviette de bain, dans le couloir d’une auberge à attendre qu’on veuille bien lui ouvrir la porte ? Cet homme s'était fait jeté de chez lui par sa femme ou quoi?

L’elfe pesta. Mais quel abruti il pouvait être des fois !
Entendant les pas de la jeune femme venir à lui il se décala :

-Nan. Répondit-il vexé que tout le monde se fiche de lui ces dernier temps. Je veux juste des vêtements.

Si il n’avait pas eu une telle dette envers cette fille il l’aurait probablement jeté par la fenêtre pour lui apprendre à se moquer de lui…ou pas.

Soya, devant l'air vexé d'Isas, faillit rire de nouveau. Mais elle se contenta de lui lancer un sourire étincelant, avant de dévaler les marches pour se retrouver dans la salle principale. La plupart des hommes lui lancèrent des regards aguicheurs, mais elle n'y fit pas attention et se dirigea vers le gérant.

- "Excusez-moi, vous auriez une chemise, une veste et un pantalon d'homme ? Je vous payerai, bien entendu."

Le gérant sourit amicalement. Agé d'une cinquantaine d'années, Soya aurait pu être sa fille, et le fait qu'il ne lui faisait pas de charme le rendait très sympathique aux yeux de la jeune femme.

- "Je vais vous chercher ça. Et inutile de payer, on va dire que c'est offert par la maison."

Soya voulut protester, pour la forme, mais il était déjà parti. Il revint peu après, portant une chemise en lin, une veste légère et un pantalon de couleur sombre.

- Ça ira ?"

La jeune femme sourit.

- "C'est parfait. Merci beaucoup !"

Soya fit demi-tour et remonta l'escalier. Quand elle passa devant lui, un homme la fixa d'un air plutôt inquiétant, mais elle ne s'en aperçut pas.
Elle débarqua devant Isas, les vêtements à la main.

- "Voici ton dû. Ça te va ?"

L’elfe regarda les vêtements, sceptique.
Genre il s’y connaissait !:

-On verra bien. Dit-il en s’en emparant.

Il tourna les talons et alla se changer dans sa chambre. Il revint quelque secondes plus tard. L’air morose. Le pantalon lui allait à peu près, quoique que légèrement plus long lui n’aurait pas été désagréable. Il aurait aussi aimé une ceinture, car même s’il ne lui tombait pas sur les chevilles…il baillait un peu. La chemise et la veste étaient cependant assez tendues. La carrure d’Isas posant quelques problèmes. Il avait d’ailleurs la vague impression que dès qu’il ferait le moindre effort, les affaires allaient craquer.
Il haussa les épaules. Tant pis. On verra bien !

-Ça devrait tenir jusqu’à demain. Fit-il avec une moue aussi convaincue que si Ingwë lui avait dit qu’il était un griffon sage.

L’homme croisé précédemment ressortit alors. En les croisant de nouveau sur le pas de la porte, mais en compagnie de Soya cette fois-ci, il sourit amusé et leur lança :

- Ça y est ? Ta femme ta pardonné ?!

Si Isas avait été un chien il aurait grogné et montré les dents… :

-Elle n'est pas ma femme!

Il aurait eu des dents...il aurait mordu! XD
Il se maudit lui-même de ne pas avoir son katana à porter de main. Alors en petite vengeance une brise assez forte poussa l’homme dans le dos. Il faillit dégringoler les escaliers la tête la première.

- Ça y est ? Ta femme ta pardonné ?!

Soya ouvrit de grands yeux... et étouffa un rire derrière sa main. Si les regards pouvaient tuer, l'homme serait sans aucun doute raide mort.
Isas avait l'air furieux. Il créa une bourrasque (c'est vrai, il maîtrisait l'air, Soya l'avait oublié) qui faillit faire tomber l'homme dans l'escalier. Morose, l'elfe tourna les talons.

- "Isas ?"

Celui-ci jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule. La jeune femme afficha un grand sourire.

- "Bonne nuit."

Sans plus de commentaires, elle rentra dans sa chambre. Se laissant tomber sur le lit, elle se glissa sous les draps et ferma les yeux.
Elle s'endormit rapidement, le sourire aux lèvres.

Isas esquissa un vague sourire au salut de Soya puis retourna dans sa chambre.

Fermant la porte derrière lui il s’allongea comme une masse sur son matelas. Fermant les yeux, l'elfe rentra alors dans le demi-sommeil de sa race.
La journée de demain promettait d’être longue… Quelle idée d’allait faire du shopping ?!

Soya dort. Paisiblement. Le clair de lune nimbe sa chambre d'une douce lumière.
Le drap qui la recouvrait a glissé et laisse voir sa robe épousant les courbes de sa poitrine. Ses cheveux auburn s'étalent sur ses épaules.
L'homme entré sans bruit dans sa chambre sourit. D'un mauvais sourire.
En trois ans, la jeune femme s'était embellie comme jamais.
Sous ses pas, le plancher grince.
Soya a le sommeil léger. Alertée par ce bruit, elle ouvre les yeux.
En apercevant celui qui se tient devant elle, la terreur qui se reflète dans son regard ambré est sans nom.

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Soya se redressa, tremblante. Ecarquillant les yeux, priant pour que ce ne soit qu'une illusion, elle ne réussit qu'à articuler qu'un seul mot.

- "Non..."

L'homme eut un méchant sourire. Il s'approcha de la jeune femme. Figée, en proie à une intense terreur, elle ne bougea pas.

- "A cause de ces imbéciles, je n'ai pas pu t'apposer ma marque. Pourtant, cela fait trois ans que tu es à moi. Tu n'as pas pu l'oublier, n'est-ce pas ? Nous étions plusieurs, à l'époque... Ils se sont tous lassés. C'est tant mieux."

Les dents de l'homme brillèrent d'un terrible éclat.

- "Je n'aime pas partager. Surtout quand Elles te ressemblent. Pourtant, pas une ne te valait. Enfin, enfin je t'ai retrouvé. Presque par hasard. Tellement délectable..."

Il sortit un couteau. Les yeux de Soya, fixés sur lui, se remplirent de larmes. Rattrapé par le pire évènement de son passé, elle trembla de plus belle.
Mais elle ne pouvait toujours pas bouger.
L'homme s'approcha. Dénuda l'épaule droite de la jeune femme, repoussant les cheveux presque avec tendresse.
Un frisson de dégoût et de peur parcourut la fée.
Puis, il agit. De la pointe de son couteau, l'homme traça un obscur signe dans la chair de Soya qui ne réagit pas.
Le sang coula. L'individu recula d'un pas, son couteau serré dans sa main.
En voyant le pourpre du sang s'étaler sur le bras de la jeune femme, il eut un mince sourire.

- "Hada Roja..."

Un grimacement.
Isas rouvrit les yeux.
Un grincement dans la chambre d’à côté. Cette fois-ci il fronça les sourcils.
Mais le silence continuait de régner. Soya était-elle prise d’insomnie ? Bizarrement l’elfe n’en avait pas l’impression. Ou plutôt le pas n’était pas celui de la fée.
Prit d’un doute il se leva, s’empara de la garde de son katana. La lame glissa doucement hors du fourreau.
Se dirigeant dans la chambre d’à côté il eut un bref tant d’arrêt. Il hésitait à frapper, après tout il n’avait pas très envie de lui retomber dessus en petite tenue :

# Un homme blesse ta protégée.# Le renseigna les murs de la chambre.

Isas ne prit même pas le temps de pester ou de se mettre en colère. « Sa protégée » ?! Et puis quoi encore ?! Bon…d’accord… peut être un peu…

Il ouvrit la porte à toute volée. L’homme se redressa. Il ne frémit même pas quand il aperçut l’elfe. Blessure rouge sang. Regard destructeur d’Isas.
L’individu eut la présence d’esprit de profiter de la surprise de l’intervenant pour se téléporter. Mais avant de s’éclipser l’homme regarda une dernière fois Soya. Avec un sourire qui fit froid dans le dos, il murmura :

-Ne l'oublie pas. Tu es à moi...

L’elfe donna un vif coup d’épée en direction du l’agresseur. Il ne frappa que du vide. L’homme était déjà parti. Il se redressa, pesta, et regarda Soya. Elle est était encore immobile. Choquée. Tremblante ?
Il eut l’air surprit. De sa main gauche il donna un bref petit coup dans l’épaule :

-Oh hé ! Fit-il avec le tact ancestrale d’un associable. Il est parti. Reprend toi… Quoique c’est un peu tard…

Aucune réaction ? Tant pis. Avec un soupir l’elfe s’accroupit à hauteur de la jeune femme et observa la blessure. S’est qu’il n’était pas médecin lui ! Toutefois il ne put s’empêcher de remonter quelque peu la fine bretelle de la robe rouge de sa propriétaire :

-Je crois que tu l’as déjà remarqué mais je ne suis pas guérisseur moi. C’est à toi de le faire. Reprit-il en désignant la marque.


HJ/ J'ai eu l'autorisation de Louve pour rp le type^^

- "Ne l'oublie pas. Tu es à moi..."

L'homme disparut. Isas était entré dans la chambre, provoquant la fuite de ce dernier.
Mais pour Soya, cela n'avait aucune importance. A peine s'aperçut-elle que l'elfe lui parlait. Lentement, elle posa une main tremblante sur sa blessure.
Elle savait qu'elle ne pourrait pas la refermer. Le couteau que l'homme avait utilisé n'était pas anodin.

- "Vënsid."

La jeune femme avait prononcé ce mot comme d'un poison. La tête baissée, les dents serrées, la main crispée sur son épaule, elle ne pouvait arrêter le tremblement qui la parcourait. Le sang gouttait sur les draps.
Les larmes perlaient de ses yeux ambrés.
Isas n'existait plus. Le lieu où elle se tenait n'était que mirage. Soya se retrouvait transportée trois ans en arrière, ou l'idée de l'apposition de la marque qui ornait à présent son épaule avait hanté ses pires cauchemars.

Isas regarda Soyalova apposer sa main sur sa blessure.. Sans réagir à ce qu’il lui disait. Il tiqua, ne comprenant pas comment elle pouvait se laissé autant allez. Se laisser autant faire. Si elle avait peur il fallait se battre ! Cela servait à quoi de rester prostré et d’attendre que ça passe.
Il soupira, haussa les épaules et alla s’asseoir au sol contre l’un des murs de la chambre. Attendant que la femme reprenne ses esprits et en profitant ainsi pour être, cette fois-ci, présent au cas où cela tournerait mal à nouveau.
Même s’il en doutait…:

-Qu'est-ce que c'est? Demanda-t-il ne supportant plus ce manque de réaction.

- "Qu'est-ce que c'est ?"

Soya leva les yeux. Croisa ceux d'Isas. Elle se rendit alors compte de sa position.
Tremblante, immobile, la main pressant une étrange blessure sur son épaule, sans réaction...
Et, vu le caractère d'Isas, il ne devait pas être des plus à l'aise...
Alors, lentement, Soya se leva. Se forçant d'oublier, du moins mettre de côté la terreur qui l'envahissait depuis qu'elle s'était rendue compte de la présence de l'homme, elle fouilla dans son sac et en sortit un bandage.
Tout en pansant son épaule, tentant d'apaiser ses tremblements et surtout, surtout, de ne pas regarder Isas... Soya répondit :

- "Vënsid est... un couteau créé par la magie noire qui empêche toute blessure de disparaître."

Il existait un moyen de contrer ses effets, mais ça, Soya ne le savait pas. Fixant sa main couverte de sang, la jeune femme fit d'une voix contenue :

- "Isas... Tu devrais retourner dans ta chambre."

Elle ne tiendrait pas longtemps. Surtout pas s'il commençait à lui poser des questions.

-Non.

Ce fut sa seule réponse. Il était tout bonnement impossible qu’il laisse une fille, La fille, qui avait sauvé Ingwë, sans défense alors qu’elle ne pouvait visiblement pas se battre.
Son regard était emprunt de détermination.
Et qu’elle pleure ou pas n’était pas son problème…