« Mayliss. »

La femme aux cheveux noirs semblait plus soucieuse que d’ordinaire.

« J’ai une très grande confiance en toi. Tu es un de nos meilleurs éléments, et tu le sais sans doute. Cependant... »

May attendit.

« Celui que je vais te demander d’espionner n’est pas à prendre à la légère. »

Hochement de tête. Nul besoin de paroles inutiles pour montrer qu’elle avait compris.

« Il porte le nom de Seiji Akihiko, mais son véritable nom est Seiji Astaldo. Il est issu d’une des grandes familles nobles du Nouveau Monde. Elle a été démantelée, j’en ignore les raisons. Il est recherché. Et apparemment plus que redoutable. »

Mayliss ne réagit pas. Elle écoutait attentivement, mais ne montrait aucun signe de trouble. Le visage de la femme qui lui faisait face, lui, était plutôt angoissé.

« May... Je ne peux pas me permettre de te perdre. Alors je t’en prie, fais attention. Je n’ai reçu aucune information concernant son caractère, mais au vu de sa réputation il est très dangereux. Et, pardonne-moi, mais si tu te fais avoir tu ne seras pas en mesure de résister. »

May eut un fin sourire.

« Ma spécialité n’est pas le combat ou l’assassinat, mais l’espionnage. Iënil... Je sais ce que je fais. Et si je me fais prendre... »

Elle haussa les épaules.

« J’aviserai. Il est peut-être criminel là d’où il vient, mais rien n’indique qu’il soit un guerrier sanguinaire. »

Iënil ne dit rien. Puis elle hocha lentement la tête.

« Alors je te fais confiance. Il a été aperçu franchissant les remparts ce matin. Il n’est pas ressorti. Trouve-le. »

Elle passa le quart d’heure suivant à lui donner les dernières instructions, ainsi qu’une description précise de l’homme que May devait « prendre en chasse. »
La jeune femme monta se changer. Puis, telle une ombre, elle s’estompa au milieu des toits.
Une grande cape la dissimulait entièrement. Agile comme un chat et plus discrète que ce dernier, elle partit à la recherche du dénommé Seiji.
Elle n’eut pas de mal à le trouver. Ombre solitaire à travers les ruelles peu animées, il était vêtu d’un kimono sombre rehaussé d’une écharpe claire servant à maintenir à la ceinture deux katanas. Ses cheveux d’un violet profond étaient retenus en queue de cheval souple. Un instant il releva son visage, et Mayliss eut malgré elle un sourire.
Voilà bien longtemps qu’elle n’avait pas épié un aussi beau garçon.
Pour l’instant, il ne semblait guère vouloir se livrer à des activités criminelles. Il marchait, c’est tout. Une petite panthère des neiges calait ses pas sur les siens.
Ombre secrète et silencieuse, May les suivit.

Seiji vagabondait.
Ou plutôt il cherchait de quelconque renseignements. Le dernier cataclysme en date l’avait assez bousculé (comme un grand nombre d’Endoriens d’ailleurs).
Le vampire avait plutôt eu du mal à trouver des informations dans le clan de l’eau, et ces dernières n’étaient ni précises, ni encourageantes.
Il soupira intérieurement, son visage quant à lui resta sans expression. Cependant il jeta un vague coup d’œil à ses côtés, vérifiant pour la mille et unième fois au moins, qu’Aerïne gambadait toujours prêt de lui. Par ailleurs la petite commençait à fatigué.
Il ralentit le pas jusqu’à s’arrêter totalement.
La petite panthère s’arrêta de bon gré et s’assit devant les pieds de son compagnon. Langue pendante elle le regarda d’un air implorant. Air qui tira un mince sourire amusé à Seiji :

- D’accord, d’accord. Répondit-il à une question non posée.

Et sitôt dit il s’accroupit, tendit les bras alors que la petite lui sautait dedans et enfin, se redressa. Le bébé mordilla avec joie la queue de cheval rapatriée sur l’épaule de l’homme.
Un instant il se demanda si Aerïne ne lui avait pas joué la comédie pour atterrir là où elle était.
Il marcha quelques pas avant de rentrer dans une auberge.
Une auberge aux allures ni douteuses, ni recommandable. En fait il aurait été difficile de donner un avis véritable. De toute façon le vampire s’en fichait il ne venait pas pour avoir une chambre :

- Bonjour monsieur.

Seiji hocha la tête en salut :

- Bonjour.

- Vous désirez dormir ? Manger ? Quelque chose en particulier.

- Rien de tout cela. Juste un peu d’eau pour Aerïne.

L’aubergiste leva les sourcils, surprit, mais apporta la gamelle demandé. Il la déposa au sol au moment où Seiji remettait à terre son amie. Celle-ci se rua vers la source et bue à grande lapée. Une fois finit il paya pour le service et ressortit tranquillement.
Il avait toujours sur lui la petite panthère.
Une fois dehors il jeta de brefs regards à droite puis à gauche. Une drôle d’impressions lui collait à la peau.
Bah, vu le monde qui s’agglutinait dans les rues il était normal de se sentir observé. Non ?
Non.
Plus de cent ans d’expérience… ça aide.
Il raffermit se prise sur le bébé et se mit à marcher d’un pas vif.
Premier objectif, se mêler à la foule.
Deuxième objectif, se faire perdre de vue. Si ce n’est complètement, au moins une fraction de seconde pour découvrir qui le poursuivait.
Il mit de longues minutes avant de trouver une opportunité plausible. C’est que son traqueur était doué.
Puis enfin il arriva à la place du marché. Là, la foule était plus dense encore, les étales plus faramineux et offraient surtout bien plus de chance de s’y dissimuler un moment.
Il fit son choix, glissant entre les gens comme ses talents le permettaient, le moment venu il se retourna le plus naturellement du monde.
Rien.
Sans laisser transparaitre son agacement il fit mine de s’intéresser aux broderies, aux bijoux. A le voir on aurait pu croire qu’il avait des gouts de luxe.
Peut être, après tout n’était-il pas originaire d’une famille de haute noblesse ?
Il continua encore son chemin jusqu'à trouver son bonheur.
Parmi tout ce bazar, une échappatoire.
Une ruelle sombre.
Une ruelle non fréquentée.
Mal fréquentée ?
Seiji s’y engouffra.
Naturellement ? Peut être d’une façon un peu précipité.
Là il déposa Aerïne au sol et se dissimula habilement dans l’ombre, une main sur l’un de ses kodachi.
Il attendit.
Le traqueur (la traqueuse ?) m’y peu de temps à arriver.
Si le vampire n’avait pas tendu tous ses sens en éveil il aurait d’ailleurs très certainement loupé son arrivé.
Son suiveur était vif.
Silencieux.
Telle une ombre…
Il en fallait plus pour l’impressionner. Sans lui laisser une seconde de répit, profitant aussi du bruit causé par sa compagne jouant avec un fin caillou il sortit sa lame dans un chuintement mortelle.
Il bougea.
Trop tard :

- Un seul geste et tu es mort. Souffla-t-il d'un ton glacial à l’oreille de sa cible.

Il n’y avait plus rien du sourire jeté à la panthère quelques minutes plutôt.
Il était vampire.
Il était tueur.
Il était Seiji.
Son arme se rapprocha un peu plus de la trachée de…la femme :

- Je veux ton nom et tes intentions. Reprit-il en murmurant presque.

Il était prêt à planté l’arme dans sa gorge à tout instant.

Mayliss avait suivi un bon moment le dénommé Seiji. Invisible et silencieuse, elle n'en avait pas moins eu un hochement de tête appréciateur devant le manège de l'homme.
Il avait senti sa présence.
Il se savait traqué.
Impressionnant.
Mais se perdre dans une foule, dense malgré l'heure tardive, ne suffisait pas à piéger la jeune femme.
Cependant, tout à sa réflexion sur le talent de celui qu'elle suivait, May le perdit un instant du regard.
Un instant de trop.
Une ruelle peu fréquentée.
La sensation du métal froid sur sa gorge.
Et une voix glaciale.
La jeune femme eut un sourire.
Décidemment, il était très doué.

"Tout doux, beau sire, murmura-t-elle d'une voix calme sans esquisser un seul geste. Me placer une épée en travers de la gorge n'est pas vraiment conseillé pour me faire parler."

Son corps comme son visage étaient encore dissimulés sous la cape. Mais faire mine de s'en débarrasser maintenant risquait d'écourter de beaucoup son espérance de vie.

"Je suis dans l'incapacité totale de tenter quoique ce soit contre vous, et de toute manière ce n'était pas mon intention. Si vous voulez me désarmer, ce sont les deux poignards accrochés à ma jambe droite. Libre à vous de croire que j'ai d'autres armes sur moi, mais très franchement j'estime que la fouille au corps n'est pas la meilleure façon de faire connaissance."

Nouveau sourire, encore invisible pour le jeune homme.

"Je vous serai gré de bien vouloir écarter votre lame pour que je puisse vous expliquer le pourquoi du comment."

Bon. Si il la tuait maintenant, au moins n'aurait-elle divulgué aucune information...

- Tout doux, beau sire .Me placer une épée en travers de la gorge n'est pas vraiment conseillé pour me faire parler.

Pourtant ceci pouvait grandement aider, et ce dans de nombreux cas… L’épée ne dévia pas.
Mais les dagues quittèrent la jambe de la jeune femme :

- Je n’ai forcément l’intention de faire connaissance. Je veux juste savoir votre nom et vos intentions. Loin de moi l’idée de vous inviter à boire un verre. Ce n’est pas moi qui traque un inconnu après tout…

Son ton restait dur.
Néanmoins il relâcha la pression de son arme, ce n’est pas pour autant qu’il la rabaissa complètement son kodachi. Et de toute façon, au moindre problème il pouvait la bloquer ou du moins la gêner en utilisant sa magie… Il avait suffisamment confiance en ses capacités pour s'autoriser cela.
Il s’écarta d’un pas :

- Vous n’avez toujours pas répondu à ma question. Reprit-il glacial.

May rit.

"Un inconnu ? Mais vous ne l'êtes pas pour moi, mister Astaldo. Je sais déjà suffisamment de choses sur vous pour trouver de l'intérêt à vous suivre... et en découvrir plus."

La jeune femme se leva avec précaution. Le katana suivit son mouvement. Elle se planta face à Seiji, le visage entièrement masqué par la cape.

"Qui je suis ? Une Ombre. May pour les intimes. Mes intentions ? Découvrir si vous représentez ou non un danger pour Endora, car si mes informations sont justes vous n'êtes pas d'ici. C'est tout. Nulle intention pour moi de vous tuer ou quoi que ce soit d'autre. Je ne suis pas un assassin. Et de toute manière, j'en aurai bien été incapable."

Elle eut un demi-sourire.

"Si vous ne m'aviez pas surprise, je vous aurais traqué, comme vous dites, pendant un temps indéterminé, sans doute long. J'ai tendance à savoir récolter beaucoup d'informations sur une personne précise rien qu'en l'observant, mais malheureusement la plupart sont diurnes. Et dans ce cas souvent beaucoup moins intéressantes."

Haussement d'épaules fataliste.

"Mais j'ai échoué. Cependant, si vous me tuez, faites-le avant le lever du soleil. Prenez ça comme une dernière volonté."

Pourtant, Mayliss n'avait pas peur. Peut-être était-ce parce qu'elle n'était pas intimement convaincu qu'il allait la tuer ?
Comme elle l'avait annoncé, elle pouvait découvrir beaucoup de choses rien qu'en observant son interlocuteur...
La jeune femme repoussa d'un geste souple une mèche de cheveux s'étant aventurée devant son visage. La lourde cape pesait sur ses épaules, May décida qu'il était grand temps de se dévoiler un peu plus.

"Vous permettez ? J'ai chaud."

Joignant le geste à la parole, la jeune femme tira sur les cordons retenant sa cape, qui tomba au sol. Sa masse de cheveux rouges s'étala dans son dos en boucles souples, ses yeux lavandes fixèrent le vampire d'un air impénétrable. Sa tenue légère, faite de cuir et de métal (voir l'avatar), finissait de prouver que la jeune femme ne possédait pas d'autres armes sur elle.
Les bras croisés, May attendit.

Lui, une menace pour Endora ?
Effectivement on pouvait se poser la question… mais tout de même. Il n’était qu’un hors la loi ayant quitté son pays d’origine, rien de plus.
Dans ce cas qui avait pu demander de tels renseignements sur sa personne?
Pas un de l’ancien nouveau monde. Du moins en doutait-il, car après tout, pourquoi ce serait-il soucié du danger représenté pour Endora.
Ou alors… Ou alors il avait affaire à un reconverti. L’apparition des nouveaux clans avait causé de grands désastres à peu près partout dans le monde et ainsi bouleversé la noblesse. De cette manière une ancienne connaissance de Seiji avait très bien pu refaire sa vie ici, à Endora, et craignait de se voir en difficulté par le vampire.
Sinon… hé bien il avait affaire à de hauts dirigeants du clan inquiet pour la sécurité du monde, tout simplement…
Immobile.
Impassible.
Seiji ferma les yeux une fraction de seconde. Le temps de consulter le futur. La dénommée May ne semblait pas mentir, il ne la voyait pas l’attaquer :

- Je ne tue jamais pour le plaisir. Rétorqua le vampire.

Et pendant qu’il rengainait, dans un doux chuintement la lame de son kodachi, la jeune femme se dévêtit.
Elle était jolie, c’était indéniable.
Miaulement enrouée.
Aerïne réclamait de l’attention. Se penchant, Seiji récupéra son amie qui eut la magnifique idée de commencer à faire ses griffe sur son sombre kimono. Il avait de la chance qu’il soit épais… :

-Et qui vous a demandé de tel informations sur moi ? Interrogea-t-il.

May haussa un sourcil surpris.
Pour le plaisir.
Il estimait donc qu'il n'y avait aucune nécessité à la tuer ?
Ma foi, ça l'arrangeait.

-Et qui vous a demandé de telles informations sur moi ?

La jeune femme eut un fin sourire.

"Mais mon employeur, quelle question. Cela dit, je crains ne pouvoir vous donner de plus amples informations à mon égard. Vous avez même plutôt de la chance."

Son sourire se tinta de mystère, son regard lavande se plongea dans celui du jeune homme comme à la recherche de quelconques informations.

"Habituellement, je prétends agir pour mon propre compte."

Mais peut-être l'information qu'elle cherchait était pourquoi elle n'avait pas menti, cette fois-là...
Mayliss déporta son regard sur la petite once que tenait Seiji dans ses bras.

"Vous avez une compagne charmante, mister Astaldo. A-t-elle un nom ? Je vous avoue que cela ne fait pas partie des informations que je devrai rapporter sur vous, mais j'ai la nuit devant moi et infiniment plus. Alors, si vous n'êtes plus décidé à me trancher la jugulaire..."

La jeune femme s'adossa à une cheminée, un sourire amusé flottant sur ses lèvres.

"Autant discuter. Sauf si vous ne le désirez pas. Dans ce cas je me verrai contrainte de continuer à vous observer jusqu'à récolter suffisamment d'informations... Ou que vous me tuiez, par lassitude. Mais je n'ai pas vraiment d'autres choix. Ou je reviens vers mon employeur avec une réponse, ou je ne reviens pas."

Un rire.

"J'avoue qu'en me découvrant, vous m'avez mise dans une situation bien embarrassante. Si vous refusez de me répondre, je n'aurais plus qu'à me plonger un poignard dans la gorge. Mort peu glorieuse, n'est-ce pas ? Echouer n'était pas censé faire partie de mon..."

May s'interrompit, soudain extrêmement attentive.

"Vocabulaire..."

Le Vent s'était mis à souffler. Il murmurait des phrases éparses que la jeune femme n'arrivait pas à saisir. Soucieuse, elle fronça les sourcils.

"Qu'est-ce que tu dis ? Je ne comprends pas..."

Un homme. Une taverne. Attention, danger !
Mayliss reposa ses yeux lavande sur Seiji.
Lui ?
Non. Pas lui.
Sur ce point, le Vent était clair.
May se coula silencieusement vers le bas du toit. La rue était calme.
De quoi parlait-il ?
La jeune femme aurait sans doute bien assez tôt la réponse.
Elle revint vers Seiji, légèrement troublée.
Les avertissements du Vent n'étaient pas à prendre à la légère.

Seiji haussa les épaules :

- Il faut un début à tout. Discuter ? De quoi ? De toute façon… quelle genre d’informations désirez-vous avoir à mon sujet. Si je les juge sans importance je peux vous les fournir après tout…

Sa main divagua doucement sur le sommet du crâne de l’once :

- Elle, se nomme Aerïne.

Il l’écouta, releva la tête.
Attentif lui aussi.
Que se passait-il ?
Pourquoi se subit changement d’attitude ?
Il n’y avait pourtant rien aux alentours…
Ce qui n’empêcha pas May d’aller vérifier au coin de la rue, pour en revenir les mains vide de toutes informations visiblement :

- Que se passe-t-il ? Demanda-t-il d’une attitude nonchalante, mais non pas moins prêt à s’emparer de son arme à chaque instant.

May écouta de nouveau, soucieuse. Mais le Vent s'était tu. Elle se tourna vers Seiji.

"Un ami tente de m'avertir... Mais je n'ai pas vraiment compris de quoi il s'agissait. N'en parlons plus."

Ses yeux lavandes jaugèrent le vampire, resté stoïque.

"Ce que je cherche à savoir ? Pas mal de choses. Pourquoi votre famille a-t-elle été démantelée ? Comment avez-vous réussi à quitter le Nouveau Monde ? Quels sont vos pouvoirs ? Mettez la dernière question entre parenthèses, je doute que vous souhaitez y répondre. Mais cela me serait utile."

La jeune femme ne souriait plus. Son rôle d'Ombre Dansante reprenait le dessus, et de plus le Vent l'avait troublée.

"Sachez que si j'estime qu'il n'y a pas vraiment de raisons pour que vous représentiez un danger pour Endora, alors mon employeur n'aura pas à savoir les réponses à ces questions. Dans le cas contraire, bien sûr, il saura tout sur vous. Mais je doute que ce soit le cas. Sinon vous m'auriez déjà tuée."

Elle jeta un coup d'oeil vers une rue transversale.

"On ne devrait pas rester ici, c'est encore trop près des avenues fréquentées."

D'un geste preste, May se recouvrit les épaules de sa cape.

"La place d'une Ombre n'est pas à la lumière."

-J’ai refusé d’obéir au royaume. Lâcha simplement Seiji. Une divergence d’opinion entre un prince et l’un de ses subordonnés. Ma famille m’a juste apporté son soutient… et les dirigeants de Valtéris n’ont pas apprécié. C’est tout. Pour quitter le nouveau monde j’ai simplement utilisé un bateau. Quant à mes pouvoirs je désire effectivement les garder pour moi…

Il fit alors silence pour écouter la jeune femme :

- Et où se trouve la place d’une ombre ? Demanda-t-il impassiblement tout en lui emboitant le pas.

Puis après un bref silence :

- Où allez-vous ?

Mais peu à peu le vampire se trouvait intéressé. Bien qu’à ce moment là il n’ait pas frémit, si la jeune femme avait réussit à trouver suffisamment d’informations pour découvrir son nom véritable… elle pourrait probablement lui fournir d’autres renseignements.

- Et où se trouve la place d’une ombre ?

May eut un fin sourire.

"Dans l'obscurité, une Ombre reste existante tout en étant invisible. C'est là sa place."

Elle jeta un regard en coin à Seiji. L'amusement perçait dans ses yeux lavandes.

"Mais certains arrivent à voir l'invisible..."

Elle se coula souplement en bas du toit, atterrit silencieusement dans la ruelle.

- Où allez-vous ?

La jeune femme ne prit pas la peine de se retourner. Mais on pouvait facilement lui deviner un sourire, lorsqu'elle répondit.

"Dans l'obscurité."

La jeune femme se hissa sur un toit adjacent, en équilibre sur les tuiles, discrète comme un chat. Elle ne vérifia pas si Seiji la suivait.
Elle savait que c'était le cas.
Enfin, elle s'arrêta. Il s'agissait d'un quartier très éloigné du centre, proche des murailles, et entièrement plongé dans l'obscurité. Seule une taverne, quelques mètres plus loin, luisait faiblement à la lueur des torches.
Une taverne...
Attention, danger !
Mais Mayliss n'y pensait déjà plus.
Elle se tourna vers le vampire.

"Nous y voilà. J'espère que vous aimez la tranquilité."

Bref sourire.

"Au fait, merci pour votre coopération. Mais donnant, donnant. Y a-t-il des choses que vous voulez savoir ?"

Un mince sourire apparut sur les lèvres du vampire quand la réponse de May se fit entendre. Le voila bien renseigné…

-Nous y voilà. J'espère que vous aimez la tranquillité.

Le vampire hocha la tête :

- Je m’y sens plus à l’aise.

Le pseudo couple s’engouffra alors dans la dites taverne :

- A vrai dire plein de chose me paraissent importantes à savoir.

Il reposa la panthère sur le sol qui, trop fatiguée pour faire des bêtises, s’allongea confortablement prêt de la table où s’assirent May et Seiji :

- Quitte à paraître égocentrique… j’aimerais que vous m’indiquiez quel genre d’information vous possédez sur moi. Par exemple, ai-je une prime posée sur ma tête ? Si c’est le cas, quel en est le montant ? Je souhaite principalement savoir quel genre de personnes va me courir après. Et si vous savez d’autres choses qui peuvent vous semblez intéressante à me dévoiler.

Il étendit sa main en une invitation explicite :

- Alors je suis tout ouïe.

May s'installa en face de Seiji, à une table un peu à l'écart. Ses yeux lavandes fixés sur lui, elle l'écouta avec attention, les mains croisées sous le menton.

"Une prime ? Oui, vous en avez une. Je ne connais pas le montant exact, mais elle est plutôt élevée. Quant à ceux qui seraient susceptibles de vous courir après, à part..."

Elle s'interrompit et eut un sourire refoulé. Elle s'apprêtait à dire "à part les femmes..."

"Il y a les chasseurs de primes, bien sûr, ainsi que les jeunes coqs arrogants en manque d'argent prêts à tout pour accéder à la richesse et à la renommée. Evitez Blackast. Et, si vous voulez un conseil..."

Elle se pencha en avant, son regard lavande plongé dans celui, bleu roi, de son interlocuteur.

"Méfiez-vous des femmes trop séductrices. Elles peuvent être de redoutables manipulatrices."

Elle se redressa en riant. Mayliss venait de lui conseiller de se méfier d'elle-même. Il est vrai que l'espionnage recquiérait un certain art de la manipulation. Mais comme Seiji s'était montré plutôt coopératif...
Derrière elle, accoudé au comptoir, un homme jeta à la jeune femme un regard intéressé.
Non. Pas intéressé.
C'était bien plus que cela.

Seiji conserva un regard neutre, ce qui ne l’empêcha pas de soupirer intérieurement. Les primes élevées attiraient toujours des problèmes. Il en avait déjà eu par le passé, mais ces fois là ne lui avait guère posé de souci puisque sa tête avait été mise à prix sur le marché noir. Il était un pion dangereux quant à la réussite des coups tordus des brigands. Toutefois à cette époque il bénéficiait de la protection du château, des soldats, et de sa propre force.
Les cartes étaient bien différentes à présent. Sauf que maintenant, il était prévenu. :

- Blackast… Murmura-t-il pour lui-même. Et à quoi ressemble-t-il ? A moins que ce ne soit une femme.

Il l’écouta ensuite donné ses conseils :

- De toute façon les méandres de l’amour ne m’intéressent guère. Je ne suis pas homme à passer mes nuits en bonne compagnie.

Il ponctua sa phrase d’un sourire quasi invisible. Au nouveau monde rare étaient les femmes qui avaient pu se targuer d’avoir obtenu ses faveurs. Rare à tel point qu’elles étaient souvent prises pour des menteuses.

May rit de nouveau.

"La séduction n'implique pas forcément de finir sa nuit en "bonne compagnie", comme vous dites. Mais vous serez prévenus. Quant à Blackast..."

Elle sourit.

"Elle n'est ni homme ni femme. C'est la capitale du clan des Ténèbres."

La jeune femme se leva. Sa cape lui couvrait à présent les épaules et le corps en laissant son visage à découvert, et ses épais cheveux rouges, ainsi que sa démarche de chat, attiraient nombre regard. Elle s'avança vers le comptoir et échangea quelques mots à voix basse avec le gérant. Celui-ci hocha la tête, sourit d'un air amusé, déposa quelques pièces d'or dans la main de May tandis que celle-ci lui rendait une clef. En revenant vers sa table, elle entendit l'homme du comptoir demander au gérant :

"Quel est le nom de cette femme ?"

Et le gérant de répondre :

"Elle s'appelle May."

La dénommée se tourna brièvement vers l'inconnu et l'observa un court instant, mais avec une attention soutenue.
La plupart des hommes agissant ainsi, tentaient par la suite une manoeuvre d'approche vers Mayliss.
Lui...
Sous le regard pénétrant de l'Ombre, l'homme détourna la tête.
May fronça les sourcils.
Lui, ne tenterait pas de la séduire.
Alors quoi ?
Attention, danger !
Mais le Vent ne pénétrait pas dans ce bâtiment.
La jeune femme se tourna vers Seiji.

"Je vais vers les murailles. Me suivrez-vous ?"

- Je vois. Je veillerais à éviter cette ville dans la mesure du possible dans ce cas.

C’est alors que, se levant, la femme échangea quelques pièces au gérant. Ainsi donc elle avait dormi ici ? Du moins en donnait-elle l’impression.
Cependant Seiji doutait d’un quelconque coup fourré, du moins à son égard. A quoi cela aurait-il avancé May après tout ? Il était plus que coopératif sur sa demande de renseignements pour le moment.

Le vampire haussa les épaules :

- Je n’ai rien d’autre à faire à présent.

Il se leva tout en prenant délicatement son « chaton » dans les bras:

- A moins que ma présence ne vous dérange ?

May eut un sourire en coin.

"Aucunement. Votre compagnie m'est plutôt plaisante, jusqu'à présent."

Seiji sur ses talons, elle sortit. L'air tiède de la nuit lui fit du bien. Elle ignorait pourquoi, mais elle se sentait plutôt tendue.
Ils marchèrent un instant, longeant la froide muraille de pierre. Puis la jeune femme leva les yeux vers une faible lueur.
Un balcon.
Le visage de May s'éclaira d'un sourire.

"Venez, je vais vous présenter quelqu'un."

La jeune femme se hissa avec facilité sur un toit, en parcourut quelques autres, agile et silencieuse, aussi discrète qu'une ombre. Enfin, elle arriva au-dessus du balcon, sauta, et raterrit souplement sur la plate-forme de pierre, une main au sol. Là, elle frappa doucement au carreau de la grande baie vitrée.

"Alynn ?"

Bruit de pas. La porte vitrée s'ouvrit sur une petite fille d'une huitaine d'années, aux cheveux bruns et aux grands yeux noirs.
Lorsqu'elle aperçut May, son visage à la peau très pâle se fendit d'un grand sourire.

"Mayliss, Mayliss !! Ça faisait tellement longtemps, j'ai eu peur que tu ne viennes plus..."

Les larmes aux yeux, elle vint se jeter dans les bras de la jeune femme, qui ne put s'empêcher une petite grimace fataliste.
Mayliss...
Alynn releva la tête, inquiète devant l'air préoccupé de May.

"J'ai dit quelque chose de mal ?"

Bref coup d'oeil à Seiji. Hésitation.

"Non, ne t'en fais pas."

Elle sourit.

"Tu croyais vraiment que j'allais t'abandonner ?"

La petite secoua la tête, toujours accrochée à Mayliss. Elle détailla le vampire avec attention, un peu craintive.

"C'est qui ?"

La jeune femme n'hésita pas longtemps.

"Un de mes amis. On se promenait, et j'ai vu ton balcon. Alors je suis venue te saluer."

Alynn se décrocha de May et se planta devant Seiji, le nez levé, la curiosité baignant son regard.

"Tu viens d'où ?"

Docile, du moins en apparence Seiji suivit tranquillement la femme marchant devant lui.
Mais où se dirigeait-elle ?
Intrigué il posait ses pas dans ceux de l’espionne.
Il leva un sourcil.
Quelqu’un ?
Qui ?
Attachant solidement Aerïne sous son bras, il partit à la suite de May d'une allure était aussi fluide et emprunte de force que peut l’être celle d’un vampire centenaire, quand sa puissance est à son apogée : La nuit.
C’est alors qu’ils arrivèrent à la rencontre.
Il ne s’attendait pas à cela.
Une enfant d’une huitaine d’années s’était littéralement jetée dans les bras de … Mayliss.
Nouveau haussement de sourcil.
Ainsi donc elle ne lui avait pas donné son nom véritable… Son regard se posa sur la jeune femme, insondable pour elle.
Cependant il fut perturbé par la petite fille. Tentant tant bien que mal d’effacer cet air sévère qui lui collait tellement au visage, Seiji fit l’effort de paraître plus doux. S’adressant à elle de la même manière qu’aux jeunes recrues du royaume intimidées par sa présence, lorsqu’il y était encore le bienvenu… :

- Je suis originaire du nouveau monde jeune dame. Je me nomme Seiji et voici Aerïne. Termina-t-il en désignant l’adorable boule de poil entre ses bras. Ravis de vous rencontrer demoiselle.

Et il ponctua sa phrase en un baisemain délicat, inclinant légèrement sa tête ainsi que le haut de son corps en un parfait gentleman.

La petite fille ouvrit de grands yeux devant le manège de Seiji. Puis elle eut un grand sourire.

"Le Nouveau Monde ?"

Elle s'assit sur le bord du balcon, le regard brillant.

"Raconte-moi, s'il te plaît ! Mayliss a plein d'histoires, mais ce n'est que la nuit, parce que..."

"Alynn !"

La petite fille s'interrompit brusquement. Elle regarda May, puis mit ses mains devant sa bouche, paniquée.

"Pardon, pardon ! J'avais oublié, pardon, Mayliss !"

La jeune femme eut un soupir et se passa la main dans les cheveux.

"Parce que ma vie est bien plus intéressante de nuit," fit-elle doucement.

Grands Dieux, quelles questions Seiji allait-il se poser ?
Alynn reposa son regard noir sur le vampire, toute excitée.

"Dis-moi, s'il-te-plaît ! C'est comment, là-bas ?"

?
Voila ce qui trottait dans la tête du vampire. Malgré tout il ne demanda pas d’explications. A quoi bon ?
Non seulement cela ne le regardait pas, mais il était aussi quasiment certain qu’elle refuserait de lui répondre. Il reporta donc son attention sur la petite et s’assit en douceur à ses côtés :

- Hum… Le nouveau monde n’est pas si différent d’Endora tu sais… Et pourtant il ne lui ressemble pas du tout.

Il ponctua sa phrase d’un sourire énigmatique :

- J’ai beaucoup arpenté les terres de là-bas. Je peux donc t’affirmer qu’il y a des petits villages chaleureux à souhait et des personnes aussi courageuses que des dragons. Les forêts y sont denses… mais pas toujours très fréquentables. Les jeunes dames dans votre genre ne devraient donc pas s’y promener. C’est l’un des seuls désavantages du nouveau monde, il regorge de brigands. Il a beau avoir des paysages splendides, surpassant même ceux d’Endora… Il n’est pas bon de s’y balader désarmé…

A présent son regard s’était fait nostalgique. Il y avait vécu plus d’une centaine d’année après tout…:

- Que voulez-vous que je vous raconte demoiselle?

La petite écoutait, la bouche grande ouverte, les yeux plein d'étoiles. Lorsque Seiji lui demanda ce qu'elle voulait qu'il lui raconte, elle bondit sur ses pieds.

"Tout ! Comment tu vivais, ce que tu faisais ! Je veux tout savoir !"

May s'assit lentement à côté du vampire.

"Alynn a une grave maladie qui détruit ses défenses immunitaires. Elle ne peut pas sortir. Elle n'a jamais vu Endora."

La petite fille hocha la tête.

"Alors je lis ! Et Mayliss me raconte plein de choses sur l'extérieur. Elle fait de son mieux, même si, heu..."

Elle se mordit la lèvre, jeta un regard craintif à May qui eut un sourire mi-figue mi-raisin. Ses yeux lavande s'étaient voilés d'une rancoeur qu'elle cherchait à dissimuler.

"Je lui parle de mes escapades, la nuit, sur les toits. Et je lui redis ce que le Vent a bien voulu me raconter."

Les yeux remplis d'adoration, Alynn s'adressa à Seiji.

"Mayliss parle au Vent. "

Le vampire observa tour à tour la jeune femme et l’enfant :

- Le vent ? Alors c’était ça, tout à l’heure ?

Puis le vampire revint vers Alynn.
Hésita.
Se décida.
Se lança.
Ce qu’il allait raconter, Mayliss (puisque c’était son vrai nom semblait-il) devait déjà le savoir, du moins en partie :

- Je suis né il y a de cela une centaine d’années. Vampire de ma race et, parait-il, noble de mon sang. Mais ma famille n’a jamais estimé devoir faire profiter de son influence ses progénitures. Nous devions gagner notre place, comme n’importe qui. Et personnellement je pense que c’est une bonne solution pour éviter l’arrogance au plus jeune âge. Mon père avait beau être assis aux côtés du roi, je suis souvent tombé dans la boue avant d’arriver à ce que je suis… ce que j’étais. Rectifia-t-il. J’ai commencé comme simple valet. Tu sais, ces hommes à tout faire que les chevaliers prennent souvent pour leur chien ? C’est un peu le cas d’ailleurs… En tout cas c’est de là que j’ai débuté. Je vivais avec les animaux de la cours. Les chiens, les chats, les chevaux, les rats aussi…

Il sourit presque. De bons souvenirs, des souvenirs anciens refaisaient surfaces :

- Je m’occupais d’eux et je suivais mes pseudos maîtres en mission. Lorsqu’ils allaient batailler pour protéger les contrés. Puis je suis devenu soldat à mon tour. J’ai eu ma propre monture, en fait, j’en ai eu plusieurs. Je passais énormément de temps à voyager et si je ne changeais pas elles n’auraient probablement pas survécues. Je trouve cela dommage, mais je n’avais pas le choix. Où j’attendais que mon compagnon de voyage se revigore et je laissais mourir des innocents, ou je prenais un autre partenaire pour devancer les ennemis…

Le vampire redressa la tête vers le ciel, observant les milliers d’étoiles collées sur la voute céleste :

- Dire que j’ai sauvé à moi-même des centaines de personnes serait faux. Nous étions plusieurs. Un groupe solide où chacun pouvait compter sur l’autre. Ma deuxième famille en quelque sorte. Et plus j’y pense… plus je me dis que si le reste de mon clan ne faisait pas la même chose que moi, c’est qu’il n’avait pas connu cette camaraderie entre partenaires. Je suis monté en garde et puis…

Et puis Seiji s’était rebellé, avait refusé de se battre et s’était fait condamné à mort provoquant le soulèvement de la famille Astaldo… puis son démantèlement…
Il tourna sa tête vers la jeune fille :

- Mais mes histoires de guerre ne doivent pas ravir vos oreilles, jeune dame. Dites-moi plutôt, comment avez-vous connu Mayliss?

Imperceptible pour qui ne s’en doutait pas. Toutefois Seiji avait intentionnellement appuyé son dernier mot en regardant la femme. Un fin sourire lui fit cependant remarqué que le vampire ne lui en tiendrait certainement pas rigueur. Depuis combien de temps ce connaissait-il après tout ?

Lorsque Seiji annonça son âge, Alynn ne put s'empêcher de pousser une exclamation.

"Cent ans ?? C'est pas possible, on dirait pas ! Tu es beaucoup trop beau."

Mayliss ne put retenir un rire amusé, mais s'abstint de tout commentaire. Après tout, Alynn n'avait pas tort...
La petite pencha la tête d'un air soupçonneux.

"Tu es un vampire ? Tu mords les gens ?"

Mais à la suite du récit, Alynn ne dit plus un seul mot, médusée, les yeux brillants, buvant les paroles de Seiji. Quand il s'interrompit, elle s'écria :

"Oh si, c'est vraiment intéressant !"

Mais elle répondit quand même avec enthousiasme à la question du vampire.

"C'était il y a cinq mois, à peu près. Je regardais par la fenêtre, fermée, parce que maman ne veut pas que je l'ouvre, elle dit que je vais attraper des maladies. Et donc, je regardais les toits, et j'ai vu quelqu'un se déplacer très vite dessus, mais comme il faisait noir je n'étais pas sûre que c'était vraiment une personne. Et puis, elle a atterri sur mon balcon, j'ai eu peur, mais je n'ai pas crié, sinon maman aurait accouru dans ma chambre. J'ai ouvert la fenêtre, et j'ai demandé "Qui es-tu ?" C'était Mayliss, et elle m'a répondu très gentiment, alors j'ai demandé ce qu'elle faisait, elle m'a parlé, elle m'a raconté plein de choses, mais comme il allait faire jour elle est partie."

May grimaça. Elle se serait passée de ce genre de précisions.

"Mais elle est revenue, les nuits d'après ! Elle m'a raconté des histoires, et j'étais contente, parce que c'était la première personne qui me disait vraiment à quoi ressemblait le monde, pas avec ses yeux, mais avec ses sentiments. Après, elle devait repartir, mais elle m'a promis qu'elle reviendrait à chaque fois qu'elle passerait à Windtora. Et voilà."

Alynn se tut. Elle regarda Mayliss, l'air vaguement inquiet. La jeune femme semblait un peu ailleurs.
"Pas avec ses yeux, mais avec ses sentiments..."
Evidemment. Pouvait-elle seulement faire autrement ?
Son regard lavande se posa sur Seiji. Elle eut un sourire. Son pseudo-mensonge sur son prénom ne semblait pas le perturber outre mesure, et c'était tant mieux. Mais quand même...
Outre ses parents, deux personnes l'ayant rencontré de nuit pouvaient se targuer de connaître son véritable nom. Iënil, et Alynn. Et maintenant, Seiji, qu'elle ne connaissait que depuis quelques heures.
Quelle différence ? Eh bien, Iënil et Alynn employaient le prénom Mayliss en sachant qu'il correspondait à la jeune espionne qui, une fois le jour venu, devenait aveugle.
May, c'était l'espionne. Tout court.
L'aveugle n'avait rien à voir là-dedans.

Vraiment ?
Son histoire était intéressante ?
Seiji ne se l’était pas vraiment imaginé:

- C'est une rencontre peu commune effectivement. S’amusa le vampire.

Puis celui-ci regarda ailleurs. La petite n’avait jamais voyagé autre part que dans sa maison ? Une idée lui traversa l’esprit :

- Dites-moi demoiselle… je suppose que vous avez un miroir chez vous ? Un grand de préférence. Dans le cas contraire une grande coupelle remplie d’eau fera l’affaire.

Seiji sourit mystérieusement. Il était un crime de ne pas connaitre ne serait-ce qu’un quart des paysages que le vampire avait découvert au court de ses voyages.
Il allait rectifier le tire.

La petite ouvrit des yeux étonnés.

"Un miroir ? Oui, j'en ai un dans ma chambre, venez !"

Seiji et May pénétrèrent dans la pièce à vivre d'Alynn. Elle désigna le grand miroir de sa coiffeuse, contre le mur du fond.

"Ça, ça ira ? Mais tu vas faire quoi avec ?"

Mayliss jeta un étrange regard à Seiji.
Allait-il dévoiler une partie de ses pouvoirs, finalement ?